La maternité, supplément (ridicule) de dignité
Théâtre de l’Odéon : Todo el cielo sobre la tierra (el sindrome de Wendy)
Texte et mise en scène de Angélica Liddell
26 novembre – 1er décembre 2013
L’univers
Elle est au centre de la scène comme au centre du monde, sur un monticule de terre qui représente une île et aussi un tombeau.
Ce spectacle a été monté en souvenir du drame d’Utoya, cette île de Norvège où 77 jeunes Travaillistes furent massacrés par un fou. Angelica Liddell évolue dans un décor surréaliste de crocodiles volants et éructe sa peur et sa haine contre la violence du monde. Nihiliste, elle ne croit en rien et ose déverser son dégoût sur les planches du théâtre. De temps en temps, des couples de vietnamiens surannés dansent la valse comme portés par la nostalgie d’un monde qui tournerait rond. Les couples sont vieux, plus du tout en phase avec le monde tel qu’il est. Ils s’accrochent à leur idée d’une harmonie, illusoire ou passée.
Les mères
Angelica, elle, est jeune encore. Elle n’accepte ni les conventions, ni la pensée de bon aloi, du genre ‘’ je ne travaille pas pour de l’argent ‘’ ou ‘’ je suis quelqu’un de bien, je participe à une action humanitaire’’.
Et surtout, elle s’en prend aux mères qui croient gagner ‘’un supplément de dignité’’ grâce à leur maternité. Elle ne veut pas faire d’enfant, le proclame haut et fier, refuse de prolonger les horreurs qui surgissent de dessous l’écorce terrestre et de revêtir les masques du jeu social. La vie, elle ne l’a pas voulue, elle lui est imposée et elle n’a aucune aspiration à la reproduire comme font les mères qui indéfiniment creusent le moule des malheurs à venir.
Angelica a raison. Le monde est quelquefois insupportable et écœurant, il suffit de voir une chose comme Utoya pour en être convaincu tout de suite.
La critique
Alors, qu’a-t-elle besoin de s’en prendre aussi à son enfance à elle ? Elle parle de sa mère qui ne supportait pas le rire et le bonheur à être, passant son temps à éteindre la joie de sa fille, des enfants, de tout le monde.
Peut-être, mais cette référence à son enfance qui viendrait comme preuve du mal dans le monde, joue à contre-courant de sa pensée. Si elle explique son attitude par un traumatisme d’enfance, alors le regard nihiliste porté sur le monde perd de sa force. Dommage, car il fallait oser attaquer la face du monde, précisément à travers la sacro-sainte maternité.
Bravo Angelica !
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